L’abstention et le vote extrême
sont la mauvaise réponse à un bon diagnostic.
Le bon diagnostic, c’est celui que mettent en avant les partis de l’extrême notamment, et que maintenant, à la veille de l'élection, font mine de partager ceux qui sont aux commandes depuis des lustres et en sont donc comptables. Comptables et responsables par leur déficit de morale publique, par leurs manquements individuels, par leur culture de la connivence et de l’entre-soi, par leur recherche choquante des cumuls et leur propension à se distribuer les chaises musicales, sonnantes et trébuchantes... Quel crédit en effet accorder à ces myriades d’élus qui viennent doctement nous expliquer, après des années de mandat, ce qu’il faudrait faire pour sortir de la crise qu’ils ont accompagnée sinon provoquée ! Eux dont le principal souci durant leurs années de mandats a consisté à échafauder des plans pour pérenniser leur présence aux affaires et, sous couvert d’altruisme, à rechercher passionnément leur propre promotion ? Ils ont fait du pouvoir et de son exercice la fin en soi de la politique et non un moyen pour faire advenir un ordre social meilleur. De cela, personne ne veut plus…sauf ceux qui y ont intérêt bien entendu, clients compris. Et ça fait malheureusement du monde ! Beaucoup de monde qui croise les doigts pour que rien ne change…
Ici et là pourtant les esprits se réveillent et, mieux, s’organisent.
Ne nous y trompons pas cependant :
- Les extrêmes surfent sur une indignation certes légitime, mais, trop heureux de faire coïncider leur stratégie de conquête du pouvoir avec le ras-le-bol généralisé des électeurs de tous bords, ils en arriveraient presque à blanchir leurs intentions et à faire oublier qu’ils sont déjà dans la place ! Constater et condamner justement, n’est pas suffisant. Il faut des compétences et un certain oubli de soi pour présenter efficacement une alternative à ce système ; il faut une vision et une volonté pour dessiner un avenir, mais une vision réaliste et non dogmatique. De plus, pour être crédibles et viables, les solutions préconisées doivent reposer sur un corpus de valeurs républicaines, référence ultime et ciment de notre contrat social. Sans ce ciment commun nous aurons à subir d’étroites idéologies et de nouveaux égoïsmes, nous aurons à faire face à ce qui était dénoncé, le chacun pour soi et l’arbitraire. Sans un engagement vertueux des hommes et des femmes qui briguent les mandats électifs, nous aurons droit à un retour en arrière tandis que s’effaceront les derniers rêves et espoirs des démocrates convaincus. Les conséquences sociales de ce fonctionnement « réactionnaire » ne pourront être que désespérées et violentes.
- Les abstentionnistes, eux, renvoient tout le monde dos à dos, ayant de bonnes raisons de douter de tous et de chacun. Quand ils ne sont pas de simples pêcheurs du dimanche, ils ajoutent à leur protestation muette une bonne dose de désespérance et un écœurement qui les conduisent à un abandon, à un fatalisme aigri, à un dédain radical pour un système qu’ils honnissent au lieu de chercher à l’amender. Ce faisant, ils entretiennent la continuité, ils la rendent possible par leur défection car l'abstention est une défection. Dans leur silence seule la réponse des partis devient audible bien que non-crédible.
Les abstentionnistes tout comme les protestataires tentés par les extrêmes détiennent pourtant la clef du changement pour peu qu’ils le veuillent vraiment. Alors que faire ? Tout l'inverse et autre chose et autrement, dirait M. De La Palisse.
Vaste programme comme aurait dit le Général ...
Mais c'est possible si on a la volonté. La solution passe par l’activation d’une démocratie ouverte sur les environnements immédiats. Les élections locales nous en donnent l’occasion.
De simples citoyens, mus par des indignations et des constats alarmistes, se lancent dans l’action locale. De cultures politiques diverses, ils ont compris que la situation imposait des urgences, urgences que la mécanique des partis ne pouvait régler sans dommages pour eux. Ces citoyens « ordinaires » connaissent leur milieu, son contexte et les enjeux à l’échelle locale. Ils connaissent surtout les hommes du microcosme politicien et peuvent mesurer leur degré de sincérité et leur potentiel d’engagement. Véritables lanceurs d’alerte, ils peuvent démasquer les imposteurs, ceux dont l’ambition passe par la satisfaction de leurs propres intérêts, ceux dont l’ingéniosité s’arrête aux moyens à mobiliser pour des réélections sans fin.
Une exigence personnelle, des engagements fermes de mandat unique, des compétences reconnues, du bon sens et un attachement sans exclusive à l’identité locale sont les conditions indispensables pour servir l’intérêt général. Tout le reste n’est que démagogie car le sourire éclatant n’est pas indispensable. Il masque souvent des intentions moins brillantes…
Que chacun réfléchisse et mesure son « champion » à l’aune de ces qualités. Peu les remplissent. Quant aux abstentionnistes, il est encore temps de participer: ils détiennent la clef du changement qu’ils ont cessé d’espérer. Pour refouler les cumulards et mettre fin au règne des professionnels du pouvoir politique local, exercez votre droit de veto, c'est votre droit de vote.