Ce n’est un secret pour personne, même si certains s’ébahissent ou s’étranglent que nous soyons encore accrocheurs après 6 ans d’opposition : oui, nous continuons et nous continuerons par respect pour nos électeurs et pour Saint-Cyprien, à préparer sérieusement les séances des Conseils Municipaux pour souligner les anomalies de gestion, poser les questions qui s’imposent et obtenir les éclaircissements dont nous privent l’absence de commissions et le mutisme endémique de nos interlocuteurs.
Certes, il y a bien ici ou là quelques mauvaises langues, quelques malintentionnés, quelques grincheux, pour nous faire remarquer, au risque de nous décourager, que nous n’arriverons à rien puisque nous n’aurons pas d’explication aux flottements et aux errements constatés : la « politique » de l’entre-soi, du coup par coup et de l’opacité est beaucoup plus payante électoralement qu’une politique participative, raisonnée et surtout transparente. Les plus défaitistes vont même jusqu’à désespérer de la démocratie et choisissent, de plus en plus nombreux ici comme ailleurs, de se détourner de la chose publique ! Aïe !
Bref, nous posons depuis près de 6 ans les questions qui dérangent et effectivement nous recevons invariablement le même type de réponse :
- « je ne sais pas exactement mais on vous le dira ».
- Variante : « je ne sais pas exactement mais on vous écrira. »
- Ou le traditionnel : « ce n’est pas à l’ordre du jour »
- talonné par la simple plage de silence
- suivie d’un curieux et masochiste « y a-t-il d’autres questions ? »
Enfin, l’assistance tenue en haleine peut se détendre lorsque retentit le fameux « on passe au vote » qui clôt inexorablement la richesse du débat.
Tout cela nous le subissons, nous le déplorons, nous nous en indignons, nous en rions même parfois …pour éviter d’en « pleurer », bien sûr.
Le risque est cependant réel que ce face à face tourne au jeu de rôles et ne s’installe dans un conformisme que la monotonie et l’uniformité des répliques finissent par stériliser. Les avis divergent sur ce point mais nous pensons quant à nous que le maire devait être conscient du danger en ce jeudi 18 juin, jour de Conseil Municipal. Pour preuve, sa longue absence en cours de séance pour tenter de trouver, sans doute, dans le calme de son bureau ou dans le réconfort d’une visite amie, une parade à la sclérose qui menaçait notre joyeuse équipe. L’opération était cependant risquée et audacieuse, la première adjointe devant prendre la présidence des débats.
Soyons justes avec elle : le directeur général des services, seul en mesure de répondre aux questions posées mais non autorisé à le faire, ne pouvait se substituer trop visiblement aux politiques. De plus, le souci de la Présidente de séance de coller au plus près des coutumes locales, l’amena tout naturellement aux comportements attendus. Transformant sa gêne en autoritarisme, et son embarras en suffisance, elle alla jusqu’à enrichir et appuyer ses propos d’intonations et de mimiques personnelles qui, sans renouveler le fond, apportèrent beaucoup à l’énervement général.
Mais passons…Le maire revint enfin dans ce conclave verrouillé ! Il lui fallait absolument reprendre la main et faire preuve d’initiative pour raviver au rouge la flamme de l’opposition et redonner à ses troupes le spectacle qu’elles attendaient.
Soyons justes avec lui aussi: il ne pouvait compter que sur lui-même et devait attendre le moment opportun pour asséner sa botte. Elle fut foudroyante parce qu’inattendue, inventive, délicate. Qu’on en juge :
A propos d’une sombre affaire de contrat, prolongé tel quel ou aménagé par avenant, il commença habilement par se taire, puis argua de l’ordre du jour, et enfin remit à plus tard les explications demandées. Rien de nouveau ne vint donc à ce stade enrichir la palette des réponses habituelles. Heureusement, l’insistance de l’opposition pour avoir une réponse lui permit d’asséner le coup imparable et novateur qu’il venait de mettre au point. Une longue phrase qui sidéra l’assistance :
« ce que vous demandez est aussi important que de savoir
s’il faut ou non mettre des poivrons dans les boules de picoulat ! »
Le coup était bas mais rude. Il se voulait méprisant et le fut pour les catalans de souche, nourris dès leur plus jeune âge d’escargots et d’anguilles, de saucisses et de boules. Un « oh ! » de réprobation jaillit de timides poitrines, vite convaincues de se taire sous le regard d’aigle des autorités patentées.
Pourquoi avoir choisi les boules, emblème de notre Sang et Or culinaire? La pizza, la paëlla ou l’hamburger n’auraient-ils pas fait tout autant l’affaire ? Avait-on besoin de semer ce doute sur notre patrimoine gastronomique, quelque nécessaire que fût la diversion ? N’y a-t-il donc rien de sacré en cette salle commune ? N’était-ce pas pousser le cochonnet un poil trop loin ?
Il me fallait la réponse et consulter illico internet.
Je dois ainsi au maire d’avoir fait un beau voyage sur ordinateur. Le résultat obtenu après de nombreuses lectures, semble sans appel : dans chaque famille, ou presque, on fait des boules de picoulat et chaque famille, ou presque, a sa version ! On peut rajouter par exemple du veau haché au bœuf et au porc, remplacer les cèpes secs par des morilles, ajouter de la cannelle ou un petit piment. N’oubliez ni l’ail, ni les carottes, ni les tomates et autres olives vertes. Mais de poivron, point de trace.
J’en ai conclu que le pouvoir du maire est immense mais qu’il ne suffira pas à nous faire douter ou à imposer sa recette.
J’en ai conclu également que chacun s’estimait à sa place et suffisant dans ses compétences à la table citoyenne. A défaut de participer à la gestion de la commune, il me faut donc chercher un autre domaine pour servir. J’ai le sens de l’initiative et le dérisoire m’attendrit : aussi vais-je m’atteler de ce pas à la fabrication des boules elles-mêmes. Nous les goûterons ensemble, un soir de Conseil Municipal. Sans poivron.
Ainsi va la vie municipale.
Jean-Claude MONTES
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P.S. 1 : la question qui était posée et qui fut roulée en boules portait sur la situation de Matt Humpage, le directeur deux fois annulé par le Tribunal administratif, renommé une 3ème fois par le maire (la Cour d’appel est saisi d’un 3ème recours en nullité) dont le contrat expirait en février 2015 et dont on s’enquerrait du renouvellement. La question demeure.
P.S. 2 : le conseil municipal a-t-il donné délégation au chef pour assaisonner la tambouille municipale de telles trivialités ? Trivialités bien insipides, quoique mesquines, pour un maître qui sait pourtant bien diffamer par voie de presse comme le Tribunal correctionnel l’a relevé, et sanctionné, dans son jugement du 26 février 2015.
Jean JOUANDET