Résumé: Le rapport n°13 au Conseil municipal est intitulé "Gestion active de la dette". On s'attend à une analyse de l'endettement communal et à un plan de désendettement. En fait le rapport ne traite que de "stratégie d'endettement de la commune". Il s'inscrit dans la pratique d'autophagie financière suivie depuis le budget 2010.
Ce titre du dossier n° 13 soumis au Conseil du 25 septembre est ambitieux : "GESTION ACTIVE de la DETTE". Un survol du document conforte l'espoir d'y trouver enfin une approche sérieuse du problème majeur de la commune, l'endettement : des illustrations d'allure technique, graphiques, fromages, tableaux, histogrammes, donnent au rapport une apparence de sérieux, inhabituelle et prometteuse. A la lecture, cette curiosité se teinte vite d'une certaine perplexité. On lit en effet dans le préambule que "depuis plusieurs années, la ville s'inscrit dans une politique de maîtrise de sa gestion financière et en particulier de la charge de sa dette" ... à ce jour la démonstration n'en avait pas été faite. Et la suite ne le prouve pas, bien au contraire.
La suite réduit aussitôt à néant la belle ambition en précisant qu'il s'agit là de "donner délégation au président" (en l'occurence ce doit être Me. Thierry Del Poso ! ) "pour recourir aux produits de financements et aux instruments de couverture" ce qui veut dire en clair: on parle de la dette au Conseil municipal pour qu'il donne mission au cabinet financier (via le maire) de faire des va et vient sur les marchés afin d'exploiterles opportunités qu'offrent au jour le jour les variations de taux. Autrement dit il faut autoriser le maire à jouer au trader pour tenter d'alléger la charge des intérêts des emprunts souscrits. Ce qui signifie que jusqu'à maintenant il n'avait pas cette autorisation régulière de le faire et qu'il l'a fait quand même. Cela montre surtout que cette "gestion active de la dette" se contente de minorer un peu l'impact des emprunts qu'il faut honorer (en réduisant à la marge l'annuité à payer) mais qu'elle n'a absolument pas pour objectif de réduire l'endettement existant. On atténue comme on peut les effets (les intérêts annuels) mais on ne traite pas la cause du mal (le montant de l'endettement)
On ne se désendette pas car cela supposerait qu'on rembourse par anticipation une partie des emprunts (grâce notamment à la vente du camping, des appartements, du terrain de la cave coopérative, etc). On tente, en spéculant sur la volatilité des marchés financiers, de limiter les dégâts en surfant d'un produit financier à l'autre pour réduire un peu les intérêts à payer. C'était l'objectif du contrat passé en mars 2010 avec le cabinet Orfeor Integral. Il était même prévu que la rémunération de ce cabinet varierait selon les "économies effectivement réalisées". La mairie ne donne aucune indication sur le montant de ces économies: y en a-t-il eu? leur montant n'est-il pas avouable? mystère.
Du reste le principal intertitre du rapport "3. stratégie d'endettement de la collectivité" révèle ce qu'est vraiment la "gestion active de la dette". On gère l'endettement, on ne traite pas le surendettement. Dans les 6 objectifs affichés c'est en toute dernière position qu'il est écrit "réduire le stock de la dette" mais ensuite on cherche en vain les actions et moyens déployés pour y travailler. Le document est sans équivoque : "la stratégie (sic) repose essentiellement sur un couple opportunisme-sécurité (sic) " consistant à saisir les opportunités de marché (par arbitrage de taux, renégociation, refinancement, etc)
Cette gestion au jour le jour (ce n'est qu'une tactique d'opportunisme) s'inscrit dans une stratégie financière passive : la ville se borne à enregistrer l'érosion de sa dette au fil des ans et en attendant 2038 elle compte sur la vente de son patrimoine immobilier et foncier pour assurer les besoins budgétaires annuels. Pour légitimer cette passivité on donne des indications chiffrées pouvant laisser croire que le cours des choses évolue favorablement et que la dette s'allège tout naturellement et rapidement sans rien faire. Le rapport se veut ainsi rassurant, il dit pour abuser le gogoque que la "vie moyenne résiduelle de l'encours" serait de 10 ans et 2 mois. Or selon les données chiffrées du compte administratif de 2011 l'encours de la dette au 1erjanvier 2012 était de 44 millions 327 350 euros (le niveau a baissé en 6 mois mais cela ne compromet pas la suite de l'analyse) : les emprunts dont l'échéance se situe entre 15 et 20 ans totalisaient 11 millions 443 160 euros soit 26 % du total, les emprunts expirant au delà de 20 ans totalisaient 21 881 062 soit 49 % du total de cet encours. Il est faux de prétendre que la vie moyenne résiduelle de la dette est de l'ordre de 10 ans alors qu'en valeur (montant de capital restant dû) plus de 75 % de la dette actuelle ne sera pas remboursée avant au moins 15 ans et la moitié de l'encours dû est à l'échéance de plus de 20 ans. En supposant d'ailleurs qu'entre-temps on n'emprunte pas.
Certes par une autre présentation tendancieuse, un histogramme présentant l'évolution prévisionnelle de la dette de 2012 à 2038 (son extinction naturelle), on fait apparaitre une courbe globalement "sympathique" qui baisse et tend vers zéro (en 2038). Il est vrai que dans 10 ans l'endettement sera réduit de moitié (du fait des amortissements annuels successifs) : autrement dit en 2022, l'endettement tombera à environ 20 millions. Mais il est plus réaliste de dire que dans 10 ans la dette ne tombera qu'à 20 millions, car 20 millions correspondent encore à un ratio de 2 000 € par habitant alors que le ratio de la strate nationale comparable est aujourd'hui de 1 467. Il n'y a vraiment pas de quoi se réjouir d'autant que ce niveau ne sera atteint qu'à condition de ne pas recommencer à emprunter, donc à condition de ne pas dépenser sans compter comme on le fait actuellement. Autant dire que la tranquillité affectée par la majorité, qui espère arriver en 2014 sans problème, en vivotant sur quelques ventes par ci par là, cette tranquillité là relève de l'inconscience et de l'irresponsabilité. Elle sacrifie l'avenir en ne l'intégrant jamais dans sa "gestion".
La ville a beau dire qu'en 2012 elle n'a pas prévu d'emprunt et qu'elle n'a pas de problème de trésorerie (merci Al Fourty) ça ne durera pas longtemps ... sauf pour elle à liquider tout le patrimoine de la commune, le camping du Bosc, les logements et immeubles, les terrains et pourquoi pas les bâtiments de Grand stade, UCPA, mas des capellans... La tactique d'opportunisme adoptée pour gérer l'endettement conduit inexorablement cette majorité à la braderie du patrimoine et elle prépare pour celle qui lui succèdera une redoutable impasse financière. Ce qui n'empêche pas de recruter de plus en plus, de tirer deux feux d'artifice de plus en plus coûteux, de subventionner les "dragons catalans" et le XIII norvégien, de sous-gérer le domaine locatif, de faire des boulodromes et de servir le champagne aux amis.
Saint-Cyprien fait de l'autophagie financière. Comme il y a des anthropophages (qui mangent d'autres hommes), des nécrophages (qui mangent des cadavres), il y a des autophages, l'autophagie étant selon le Littré "l'entretien de la vie aux dépens de sa propre substance, chez un animal soumis à l'inanition", la ville vit en autophagie. La ville est paralysée par son surpoids financier. Elle le sait et elle attend que ça passe tout seul. Elle soigne les symptômes superficiels du mal, pas les causes. Elle refuse même de se mettre au régime, elle se contente de ne plus consommer à crédit, elle s'ampute peu à eu et se grignote, la ville se consomme pour survivre. La ville est autophage mais elle fait fièrement la fête, en attendant que ça passe ou que ça casse.