L'information est sympathique car l'évènement s'inscrit dans une démarche de solidarité dont s'honore une commune: le thé dansant des "aînés" comme l'annonce le courrier du maire aura lieu le 10 décembre et le colis de Noël sera distribué à partir du 17.
Cependant, sans vouloir jouer au rabat-joie ni au donneur de leçons, je me demande, comme tous les ans, si la distribution générale d'un colis de friandises à tous les "aînés" est le bon geste de solidarité. Et au risque de choquer les uns ou les autres, cette année je le dis franchement : l'état de "démis d'office" et d"inéligible" permet cette libre expression qui n'engage que moi et mon appartenance à la tranche d'âge des bénéficiaires de la générosité publique m'en donne le droit. Je le dis franchement car je ne suis pas le seul, loin de là, à le penser : ce n'est pas la vieillesse qui crée le droit à la solidarité et à la compassion collectives, c'est la vieillesse grise, triste, inconfortable, maladive, solitaire ou nécessiteuse qui crée le devoir de solidarité de la part de la commune.
Evidemment tous les heureux bénéficiaires savent gré à la commune de ce cadeau gourmand qui arrive au bon moment, celui des douces et joyeuses retrouvailles familiales. Mais le sens et la portée du geste différeront profondément selon la situation affective et matérielle de chacun. Aux uns le colis apporte un petit réconfort matériel et moral précieux dans le dénuement et la solitude où l'âge les a laissés; ces gâteries de Noël sont attendues et reçues par eux avec joie et reconnaissance car répondant à un véritable besoin. Aux autres que la vie a mieux épargnés, le présent municipal est un témoignage de sympathie appréciable mais moins nécessaire et parfois même superflu. L'âge n'est pas naturellement et ne peut pas être politiquement le seul critère discriminant de la générosité publique. Certains des plus âgés auraient sans doute besoin de plus de sollicitude et de davantage de produits alimentaires alors que, espérons-le, nombre d'autres de la même génération, plus aisés et bien entourés, pourraient sans en pâtir se désister de ce cadeau à leur profit ou au profit des "resto du coeur".
Plus qu'une critique - car l'idée générale reste bonne, seule sa mise en oeuvre mérite d'être affinée - j'émets la suggestion que la commune ait une approche plus sociale que politique, et que, à coût constant, elle réserve (et même enrichisse) son colis aux personnes âgées isolées et modestes, dont le dénuement moral et matériel légitime un effort de solidarité significatif, voire plus substantiel encore, de la collectivité publique et que les seniors des catégories sociales plus favorisées acceptent de bon coeur de participer à ce geste et de le renforcer en se désistant à leur profit.
Jean JOUANDET