Soyez les bienvenus parce que « vous avez été élus avec cette liste majoritaire, que vous adhérez à la politique ... qui a été menée depuis 2009 et qu’il était enfin temps que ceux qui ont été élus sur une liste démocratiquement puissent présider au destin de la commune aux lieu et place de ceux qui au bout de 8 semaines ne s’y sentaient pas à l’aise et auraient du, à mon sens, prendre la décision de quitter ce groupe majoritaire et cette assemblée ». C’est ainsi que le 23 août, les 3 bouche-trous ont été accueillis au sein du Conseil municipal en remplacement des conseillers démissionnés d’office. Quatre formules dans cette phrase méritent d'être soulignées.
1. Ils "adhèrent" : les vacataires d'août 2012 sont déclarés solidaires de tout ce qui a été décidé avant leur arrivée. Il sont déjà comme les autres "soudés". Ils assument sans rien dire la responsabilité morale de "la politique menée depuis 2009". C'est la démocratie delposique
2. "majoritaire" : l'adjectif est récurrent et magique, absolutoire et dictatorial. J’ai eu la majorité, donc j'ai raison. Vous êtes dans la majorité, donc vous me donnez raison. Ceux qui me critiquent renient la majorité, ils doivent être exclus de la majorité et de tout. Qui a parlé de "terrorisme"? N'est-ce pas là la dictature de la majorité redoutée de Tocqueville : "Je regarde comme impie et détestable cette maxime, qu’en matière de gouvernement la majorité d’un peuple a le droit de tout faire, et pourtant je place dans les volontés de la majorité l’origine de tous les pouvoirs (...). Lors donc que je vois accorder le droit et la faculté de tout faire à une puissance quelconque, qu’on appelle peuple ou roi, démocratie ou aristocratie, qu’on l’exerce dans une monarchie ou dans une république, je dis: là est le germe de la tyrannie, et je cherche à aller vivre sous d’autres lois".
3. "il était enfin temps" qu'ils remplacent ceux qui ... Ce ouf! de soulagement qui se force à la sobriété dissimule à peine l'aveu de satisfaction de celui qui est enfin parvenu par une mesquine manœuvre à se débarrasser (momentanément) des gêneurs. Manœuvre que la Cour d'appel appréciera.
4. "pas à l'aise" : présentation faussement anodine des choses, les exclus ne se sentaient « pas à l'aise" dans le groupe, ils auraient du quitter d’eux-mêmes l'assemblée. La formule est tactique parce qu’on y retrouve l'explication subjective donnée depuis l'origine aux dissensions sur les affaires: seuls la "haine" et le mépris auraient inspiré notre dissidence, non pas le désaccord sur les méthodes, ni la contestation des décisions, ni la critique des illégalités. Dès la fin du mois d'octobre 2009, ceux qui allaient devenir les Pugnace étaient qualifiés "d'intellectuels" (concept certes relatif dans le contexte mais injurieux) et par voie de conséquence intellectuels dédaigneux. Autrement dit le recours préconisé à la raison et à la réflexion, les conseils de méthode et d'organisation, les suggestions de travail et de procédure ne pouvaient être à leurs yeux qu'une prétention personnelle, une attitude de sur-ego mal-pensant car mal à l’aise.
Et derrière la formule tactique on retrouve la question fondamentale sur "l'être ou le faire". Les élus sont-ils élus pour être bien dans leur groupe, pour jouir de la convivialité des camarades, pour prendre leurs aises? Le bonheur d'être à l'aise dans une assemblée harmonieuse est-il une garantie d'efficacité politique? Chacun sait que, si l'on veut exercer le pouvoir et pas seulement en jouir, la politique est balisée de difficultés, de conflits, d’échecs, d’impopularité, de troubles et d’incertitudes. Ce n’est pas un long fleuve tranquille où l’on navigue sereinement entre amis.
Nous ne sommes pas venus au Conseil pour être « à l’aise » entre copains ou complices : on est venu nous chercher pour faire le boulot, pas pour prendre du bon temps. Nous y sommes restés, bien que sans agrément ni satisfaction, pour le même motif : celui de participer à la gestion publique d’une façon ou d’une autre, dans la responsabilité ou dans le contrôle. En bref nous ne sommes pas de ceux qui pensent que le conseil municipal ou le groupe majoritaire sont un lieu d'aisance (le mot est au singulier) ; nous persistons à vouloir que ce soit un lieu de faisance, et le plus possible de bien-faisance ... pour la population.